En 1827, Nicéphore Niepce réalise la première photographie, très contrasté elle présente les lignes principales du paysage. Suite à cela est créé la caméra obscura, puis le sténopé qui préfigurera à l’appareil photographique que nous connaissons aujourd’hui. Ce dernier est un objet fragile et rudimentaire que nous pouvons voir désormais comme une caricature des appareils argentiques : une boite percée d’un trou de 3mm et un papier photosensible face à ce trou. La prise de photographie avec cet appareil est très méticuleuse, il faut prendre en compte la luminosité, la profondeur de champ, le diaphragme et le temps de pause. Au 19ème siècle, la prise d’une photographie était alors un événement. Le photographe plaçait les différents figurants, puis en fonction de l’exposition calculait le temps de pause, allant de 30 secondes à une dizaine d’heures, voire plusieurs jours dans le cas de lieux très sombres. 

Et si, à notre époque où chacun prends une multitude de photographies par jour, nous arrêtions le temps pour prendre une photographie comme au 19ème siècle ? Et si nous la réalisions dans l’espace public, que serait la réaction des passants ? 

Pour renforcer l’anachronisme du média, nous avons décidé de réaliser nos photographies dans des lieux très marqués architecturalement du 19ème siècle à Nantes qui sont le Passage Pommeraye et la Rue Crébillon. Ces passages ont un autre intérêt : ils sont bordés de boutiques et alors très passante. Après avoir conçu nos trois sténopés et installé notre laboratoire improvisé dans une salle de bain, nous avons pu commencer notre marathon : installer le sténopé, prendre la photographie pendant 10 minutes, courir à l’appartement, donner le sténopé au labo, repartir avec un autre sténopé, installer ce dernier, prendre une nouvelle photographie,… 

Vingt photographies ont été capturés pour expérimenter le média ainsi que l’environnement agité qu’est l’espace public. De cette expérience, le tryptique témoigne du temps qui passe, de celui qui s’oublie dans la chambre noire, s’efface par le sténopé et s’étire par le numérique. La période des soldes engendre l’effervescence. À la croisée des flux on s’installe, le figurant pose, le sténopé s’ouvre désormais pour plusieurs minutes et on attend. Les passants défilent, intrigués ou bien passifs. Ils s’excusent parfois par peur de gacher le cliché, ne sachant pas si cette boîte en carton capture vraiment l’instant présent. L’effet que cela provoque dans cet espace public est alors le ralentissement. Quelques comportements sont inatendus, crier et mimer «action» par un passant démarre le début de notre séquence sténopé. D’autres n’ont pas le temps de se positionner dix minutes devant la boîte pour avoir son portrait ce samedi 20 janvier. Les gens n’ont pas le temps. Les gens ne prennent pas le temps. D’une image à l’autre le temps se fige pour quelques individualités et laisse le collectif de l’espace public en activité. 
Sténomaton nantais
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"ENTRE 7 ET 8 MINUTES LE STÉNOMATON DANS L’ESPACE PUBLIC NANTAIS" BOURGEAIS Bastien - CHAGNON Espérance - GEINDRE Noée - HOUÉ Vincent - LEÓN Joa Read More

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