Julien GERARD's profile

Le tour du Bénin à moto

1er décembre 2012, j’entame un long voyage de 2500 km en moto qui doit me conduire de Cotonou, au Bénin, à Malanville dans le nord, à la frontière du Niger. Le retour se fera par l’est du pays en longeant le Nigeria.
A COTONOU, QUELQUES JOURS AVANT LE DÉPART...
Fin novembre 2012, je me trouve à Cotonou pour exécuter une commande photos de l’un de mes clients et prote de mon temps libre pour organiser mon voyage.
Priorité des priorités : acheter une moto. Je me rends chez le concessionnaire « du coin ». Très vite, mon choix se porte sur une marque chinoise : Sanya. La version 125 cm3 me paraît susante pour arpenter les routes et pistes du Bénin. Elle est surtout particulièrement accessible en terme de tarif : 335 000 francs CFA soit environ 500 €. Je réalise qu’en France, on a tout juste un vélo pour cette somme...
Le vendeur me livre la moto telle quelle. Pas de long discours, deux ou trois explications succinctes et « roule Raoul »... Je découvrirai plus tard que la moto est dotée de nombreux équipements bien pratiques dont, notamment, une alarme avec commande à distance.
Au fil des jours, mon achat se transformera en plaisir graduel. Comme quoi, il sut parfois d’inverser les choses pour passer de satisfait à très satisfait. Les « marketeurs » devraient rééchir à cela... L’achat s’eectue donc ultra rapidement : en moins d’une demi-heure, je prends possession de mon engin. Au Bénin, les plaques d’immatriculation étant inexistantes, la paperasserie s’en trouve simpliée à l’extrême. Tant mieux car j’ai toujours eu quelques animosités envers les papiers !
C’est sur les bons conseils d’un ami, tout juste après avoir quitté le concessionnaire, que je me rends chez un soudeur an de prolonger le porte-bagage de ma pétrolette « made in usine du monde ». Mon sac, un\n peu volumineux, est, bien sûr la cause de cette chirurgie fonctionnelle. Véritable Mozart du chalumeau, en deux temps et trois mouvements, il soude une superbe extension au porte-bagage. Et voilà comment ma Sanya s’avère prête à aronter son idylle kilométrique avec moi.
Cette première semaine à Cotonou me laisse le temps de l’apprivoiser malgré une adaptation parfois périlleuse à un sélecteur de vitesses on ne peut plus surprenant. Mais, visiblement, Sanya aime bien que je lui fasse du pied et se laisse dompter...
J’en prote également pour rencontrer Aurélien. Il dirige une agence de voyage solidaire, Double Sens et nous avons été mis en relation par Sophie, une amie commune de Strasbourg. Le monde est petit. Il s’avère qu’il connaît également deux de mes amis en Côte d’Ivoire ! Nous parlons de mon voyage, il connaît bien le pays et me donne de précieux conseils.
DE COTONOU À POSSOTOMÉ, CHEZ THÉO...
1er décembre 2012, jour du grand départ (attendu). Mes premiers kilomètres se font à Cotonou, ville où la circulation est plus qu’étonnante. Ici, il faut savoir rester zen en toutes occasions... et elles sont fort nombreuses. Je n’ai pas vraiment fait de planning de route, tout juste ai-je tracé mon itinéraire. Mon objectif premier est de parcourir le pays, pour le reste j’ai décidé de me laisser porter par les rencontres.
Ma première escale est prévue chez Théo, un ami rencontré lors d’un précédent voyage. Il tient une auberge sur les rives du lac Ahémé à Possotomé, un endroit plus que paisible. Son restaurant, sur pilotis, offre un réel dépaysement culinaire.
Sortir de Cotonou n’est pas une mince aaire ! Entre les camions, les innombrables motos et la cinquantaine de kilomètres de travaux, j’arrive à Possotomé au bout de longues heures de route. Théo me réserve un chaleureux accueil dans son havre de paix qui eure bon le farniente. Et il me faut bien cette récompense tant je suis exténué par ces kilomètres où j’ai dû faire preuve d’une extrême attention.
Ce premier périple m’amène à constater un vrai désagrément : mon sac photo prenant beaucoup de place, je suis dans l’obligation de m’asseoir très en avant sur la selle. Peu confortable, une autre solution s’impose d’urgence. Première nuit paisible...
2 décembre 2012. La matinée est rythmée par la lecture, les discussions et l’étude de mon parcours. Le soleil est haut, la lumière peu propice à la réalisation de belles photos... Théo connaît tous les trésors de sa région. C’est d’ailleurs grâce à lui que j’ai pu découvrir, il y a quelques mois, le marché typique de Lobogo et que j’ai également eu la chance d’assister à « la toilette des nourrissons », une coutume ancestrale.
Cette fois, il me propose d’aller visiter les villages des Terres Noires. C’est en milieu d’après-midi que nous partons pour vingt-cinq kilomètres de pistes plutôt chaotiques. A plusieurs reprises, étant à deux sur la moto, je me demande si je ne vais pas l’estropier. Son mécontentement se manifeste à travers la béquille centrale qui encaisse comme un boxeur roué de coups...
Nous arrivons un peu bringuebalants mais entiers ! Je me balade quelques heures. Au l des rencontres, d’échanges nourris et sympas, on me sollicite pour des portraits. Comme souvent au Bénin, je me retrouve vite submergé par les demandes. Des dizaines d’enfants me suivent. Je me sens un peu moniteur de colo...
Ici, il n’y a pas de touristes et les relations restent sincères, empreintes de naturel. Aucune agressivité, bien au contraire... Malheureusement, il nous faut repartir avant la tombée de la nuit car le retour pourrait se montrer compliqué.
De retour « at home », la soirée se déroule en compagnie d’amis de Théo, un couple de Français qui s’installe pour quelques mois au Bénin. Ils fêtent leur pendaison de crémaillère. On carbure au sodabi, une sorte de « schnaps » local...
Théo me propose de rendre visite, le lendemain, aux potières de Sé. C’est jour de cuisson des poteries et le spectacle est, d’après lui, à ne pas manquer ! Curieux et très intéressé par cette proposition, je passe ma seconde nuit à Possotomé et je m’endors la tête dans les poteries de Betschdorf et Souenheim. Résurgence alsacienne...
Matinée tranquille... Vers 15 h, nous partons direction Sé. Je découvre et le spectacle s’avère en eet particulièrement visuel. Les femmes déposent les poteries dans des fosses, à même la terre. Elles les recouvrent de branches sèches qu’elles en amment. Les poteries cuisent ainsi dans d’immenses brasiers qui dégagent une chaleur extrême. Je reste plusieurs heures à observer, fasciné par le procédé. Je mitraille allègrement... Quelques femmes viennent vers moi pour discuter, d’autres se cachent pour ne pas être photographiées. Certaines n’hésitent pas à se moquer de moi en me voyant faire de grands détours pour éviter la chaleur des foyers. Amusé, je rentre dans leur jeu... Cela m’évite d’expliquer mes doutes quant à la capacité de résistance de mon matériel photo face à de telles sources de chaleur ! Nous rentrons en n d’après-midi. Je passe ma dernière nuit chez Théo.
Je repars dans la matinée et décide de m’octroyer un zeste d’aventure : traverser le lac Ahémé en pirogue avec la moto ! Cela me détourne un peu de mon chemin mais l’expérience m’amuse... L’embarcation arrivera avec une heure de retard sur l’horaire prévu. Ici, rien ne presse ! Le temps est aussi statique que l’eau du lac. Et tout le monde s’en accommode. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, ma Sanya est levée et chargée ! D’un œil attentif, j’observe... craignant une catastrophe. Je m’inquiète pour rien. En moins de cinq minutes, ce ne sont pas moins de quatre motos qui sont embarquées ! La traversée se fait sans encombre. J’apprécie l’instant, il est unique. Les pieds à nouveau sur la terre ferme, je reprends ma route. J’avale quarante kilomètres de piste tout confort. Un peu trop beau pour durer ! La suite du parcours s’avère bien moins confortable : quatre-vingt kilomètres sur une route truée de nids de poules. Un élevage intensif... La moto tient le choc. Quant à moi, je suis aussi secoué qu’une bouteille d’Orangina. J’arrive à Abomey en n d’après-midi, la pulpe décollée, totalement dégazéié.
ABOMEY, LA VILLE DES ROIS
J’ai prévu de passer deux nuits à Abomey. L’auberge d’Abomey est un vrai havre de paix. Les chambres se trouvent au fond d’un grand jardin et la cuisine y est plutôt bonne. Dès mon arrivée je suis accueilli par une foule d’artistes avec leurs oeuvres à vendre. L’hôtelier les a sans doute prévenus de l’arrivée d’un « yovo » (blanc).
Parmi eux, il y a Arolando, un artiste peintre, sculpteur et musicien ! Un rasta. Nous sympathisons vite et nous mettons d’accord sur plusieurs peintures.
Le rendez-vous est également pris pour visiter la ville le lendemain après- midi. Il a disséminé à quelques carrefours des sculptures représentant des rois, des métiers ou des esprits vaudous. La balade est sympa, c’est un très bon moyen de découvrir la ville.
Le matin, lui, est consacré à la visite d’un centre de réinsertion pour les jeunes lles de la rue. Elles y apprennent un métier mais aussi à lire, écrire et quelques bases de mathématiques.
L’adresse m’a été donnée par Aurélien. Ce sont les voyageurs de son agence de voyage solidaire qui prennent la casquette de prof !
CHEZ ARMAND, À DASSA...
Je me rends chez Armand. J’ai prévu d’y passer deux nuits et une seule journée. Armand tient une ferme, il y a aménagé deux chambres d’hôtes. Il sait recevoir... Le dîner se fait en famille. Il en sera ainsi de tous les repas jusqu’à mon départ. Nous échangeons sur bien des sujets : la France, le Bénin, nos diérences et, bien sûr, nous évoquons mon voyage.
Armand a du mal à comprendre ma curiosité, mon envie de parcourir le monde. Sa lle, lycéenne, est plus ouverte et ne rêve que de partir. Elle se montre très lucide. Elle aimerait venir en France, non pas pour y vivre et y trouver du travail mais juste « pour voir » comme elle dit. Par la suite, elle aimerait faire un tour du monde. Ses parents soulignent ses bons résultats à l’école, son ambition, son caractère décidé... Ils s’attendent à\nla voir quitter le domicile familial dès qu’elle en aura l’opportunité.
Après une première nuit réparatrice, je pars de bon matin à l’assaut de l’une des collines qui bordent la ville. Je suis accompagné d’un guide sur le bon conseil d’Armand. Les collines sont un peu la particularité de l’endroit. Elles sont nombreuses. L’objectif est de faire quelques photos de paysages. La météo n’est pas au mieux. De plus, la chaleur et la poussière créent un voile atmosphérique bien encombrant.
Le tour du Bénin à moto
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